La vaccination des 5-11 ans va-t-elle améliorer la situation au Québec?

La vaccination des enfants pourrait également avoir son lot d’incidences sur les milieux scolaires en réduisant notamment les perturbations liées à la gestion des éclosions dans les écoles, comme l’isolement des cas et les fermetures de classes.
Photo: Jack Guez Agence France-Presse La vaccination des enfants pourrait également avoir son lot d’incidences sur les milieux scolaires en réduisant notamment les perturbations liées à la gestion des éclosions dans les écoles, comme l’isolement des cas et les fermetures de classes.

N’ayant toujours pas eu l’occasion d’être vaccinés contre la COVID-19, les jeunes enfants sont frappés de plein fouet par la quatrième vague depuis la rentrée scolaire. À eux seuls, les 0-9 ans représentent 25 % des cas confirmés à travers le Québec depuis les deux dernières semaines. Alors que la vague actuelle ne semble pas s’affaisser, l’opération imminente pour immuniser les 5 à 11 ans permettra-t-elle de changer concrètement les choses dans les bilans quotidiens ?

Les prédictions du modèle mathématique du nouvel avis scientifique du Comité sur l’immunisation du Québec (CIQ) indiquent qu’une vaccination des jeunes de 5 à 11 ans débutant avant la période des Fêtes pourrait atténuer l’effet des rassemblements qui surviendront à cette période, en plus de réduire la transmission de la COVID-19 dans l’ensemble de la population par un gain sur l’immunité de groupe.

Car, selon les projections, il n’est pas impossible qu’on assiste à une recrudescence des cas et des hospitalisations à la suite de l’augmentation des contacts sociaux pendant la période des Fêtes, malgré une couverture vaccinale élevée parmi les personnes de 12 ans et plus. En augmentant ainsi la couverture vaccinale totale de la population, la vaccination des enfants pourrait réduire la transmission communautaire. Toutefois, le moment de la vaccination des enfants serait déterminant.

« Si la vaccination débute avant qu’il y ait tous ces rassemblements, ça peut casser davantage la transmission. Si la vaccination survenait alors qu’il y aurait déjà une augmentation de la transmission communautaire, l’impact serait moindre », explique le Dr Nicholas Brousseau, médecin spécialiste à l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) et président du Comité d’immunisation du Québec.

De son côté, le Dr Jesse Papenburg, pédiatre infectiologue et microbiologiste à l’hôpital de Montréal pour enfants, soutient également qu’une seule dose administrée aux enfants pour le temps des Fêtes pourrait améliorer la situation.

« Cette première dose confère une protection deux semaines après son administration. La protection n’est pas complète, mais elle est quand même substantielle. Ça va permettre aux familles de se réunir de façon plus sécuritaire, avec les enfants qui ont reçu une première dose. Plus que s’ils n’en avaient pas eu du tout », explique le Dr Papenburg, qui ajoute que la deuxième dose sera nécessaire pour une immunité « encore meilleure et prolongée ».

Rapport bénéfice/risque

 

En plus de réduire la propagation du virus dans la population, la vaccination des 5-11 ans pourrait permettre de réduire les cas au sein même de la tranche d’âge. Alors que les 5-11 ans représentaient environ 33 % des cas chez les enfants lors de la première vague, cette proportion a monté à environ 40 % lors des deuxième et troisième vagues et à 60 % lors de la quatrième vague, dans un contexte où les enfants de 12-17 ans sont maintenant largement vaccinés.

La vaccination aurait toutefois peu d’effets sur les hospitalisations de ce groupe d’âge, étant donné leur faible risque de complications. En date du 16 octobre 2021, 34 410 cas de COVID-19 et 52 hospitalisations ont été rapportés depuis le début de la pandémie dans la population de 650 723 enfants âgés de 5-11 ans au Québec. Aucun décès n’a été déclaré.

Bien que les taux d’hospitalisation des 5-11 ans soient les plus bas parmi les groupes d’âge pédiatriques examinés, le Dr Papenburg rappelle que les cas graves ne sont pas impossibles et qu’il vaut la peine de les prévenir. « Des études ont fait état de quelques centaines d’hospitalisations en pédiatrie [au Canada], pour une COVID aiguë ou pour le syndrome inflammatoire multisystémique. Ces enfants-là peuvent être très malades. »

Aux États-Unis, où près de trois millions d’enfants ont déjà reçu au moins une dose, aucun effet secondaire grave lié à la vaccination n’est à déplorer jusqu’à présent.

Un pas de plus vers la normalité

 

La vaccination des enfants pourrait également avoir son lot d’incidences sur les milieux scolaires en réduisant notamment les perturbations liées à la gestion des éclosions dans les écoles, comme l’isolement des cas et les fermetures de classes.

Plus de 45 % des éclosions actives au Québec en date de mardi étaient répertoriées dans les établissements préscolaires et primaires, faisant d’eux les milieux les plus touchés par les éclosions dans la province, selon les données de l’INSPQ.

« C’est clair que, dans les milieux fréquentés par les enfants, si on atteint des taux de couverture importants, on devrait effectivement voir moins d’éclosions et aussi un changement dans la gestion des contacts », croit le Dr Papenburg. Un enfant pleinement vacciné qui aurait eu un contact avec un cas confirmé de COVID-19 n’aurait éventuellement plus besoin de se placer en quarantaine, donne-t-il comme exemple.

Des 248 nouvelles éclosions recensées dans la province la semaine dernière, 113 (45 %) provenaient des milieux préscolaires et primaires, surpassant les milieux de travail (24 %) et les milieux de garde (14 %).

Pour le Dr Papenburg, prévenir les infections des enfants permettra non seulement d’éviter une foule de tracas aux familles, mais aussi de faire un pas de plus vers un semblant de normalité, à l’école comme dans les activités parascolaires. « La socialisation est tellement importante pour leur développement, leur bien-être et leur santé mentale, souligne-t-il. Ils ont beaucoup souffert pendant la pandémie. Je pense que la vaccination de ce groupe d’âge nous fait faire un pas de plus vers la normalité. »



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