L’accueil de maires russes et ukrainiens à Québec cet automne crée un dilemme

Québec pourrait ouvrir ses portes à des maires de Russie cet automne. Le congrès de l’Organisation des villes du patrimoine mondial (OVPM) aura lieu dans la capitale nationale, en septembre, et l’accueil éventuel de délégations russes oblige à un périlleux exercice d’équilibrisme au moment où le maire de Kiev a lui-même manifesté son intention d’y être.
C’est une organisation dont la mission — « perfectionner la gestion des villes qui comptent un site reconnu par l’UNESCO » — n’attire aucune controverse. Son congrès annuel, en temps normal, ne fait aucune vague lui non plus. La guerre, toutefois, crée des remous jusque dans des instances sans histoires.
C’est ainsi que l’OVPM se retrouve avec un problème épineux à résoudre. Les villes de Kazan et de Saint-Pétersbourg, en Russie, pourraient envoyer une délégation à Québec cet automne. Les villes de Lviv et de Kiev, en Ukraine, espèrent déjà venir dans la capitale nationale en septembre.
L’armée d’un pays saccage, depuis fin février, le peuple et le patrimoine de l’autre. La possibilité que des maires issus des deux camps adverses se rencontrent à Québec, cet automne, met visiblement l’organisation mal à l’aise.
« Actuellement, nos membres russes ont adopté une position très low profile, indique le secrétaire général de l’OVPM, Mikhaël de Thyse. Il n’y a pas de provocations et on essaie de maintenir la situation comme elle est. »
Pour le moment, ni Kazan ni Saint-Pétersbourg n’a demandé à venir à Québec. « Le but, c’est qu’ils comprennent d’eux-mêmes et qu’ils décident de ne pas s’inscrire », souligne le secrétaire général, en poste depuis moins d’un an. « Soyons clairs : ils ne sont pas les bienvenus. »
La ministre plaide la non-ingérence
La ministre des Relations internationales du Québec, Nadine Girault, se montrait moins catégorique et a refusé de prendre position lorsque Le Devoir l’a interrogée au sujet d’une venue éventuelle de maires russes cet automne.
« On ne s’ingérera pas dans la politique internationale comme ça, a indiqué la ministre Girault. S’ils veulent venir visiter, nous verrons comment nous réagissons à ce moment-là. »
« C’est un enjeu très, très sensible, a quant à lui affirmé le maire de Québec, Bruno Marchand. Il est tôt encore pour décider quant à l’accueil des gens. »
« Il faut tout d’abord suivre l’évolution du conflit, selon lui. Il faut aussi prendre en considération les demandes et les exigences que formuleront les délégations ukrainiennes qui seront en mesure de venir à Québec. »
L’organisation des villes du patrimoine mondial pourrait, en cas de « provocations », décider d’exclure ses membres russes lors de l’assemblée générale qui aura lieu à l’occasion du congrès. Hors de question, toutefois, de faire de l’événement « une plateforme sur la guerre ».
« C’est le maire de Kiev qui vient faire du réseautage et coopérer avec les maires du monde », a précisé M. de Thyse, à propos de la venue éventuelle de Vitali Klitschko, ancien champion mondial de boxe maintenant rendu à la tête de la capitale ukrainienne. « Après le bombardement des bombes, il y aura un bombardement de financement. Ça va être des dizaines de milliards, voire des centaines de milliards et donc il va falloir aider les maires. L’OVPM sera prête, avec son réseau, à aider à la reconstruction. »