Les consommateurs laissés pour compte par Hydro-Québec

En octobre 2019, une coalition d’organismes regroupant de grandes entreprises, des PME et des groupes de protection des consommateurs dénonçaient à l’unisson le projet de loi 34 (devenu la Loi visant à simplifier le processus d’établissement des tarifs de distribution d’électricité, LQ 2019, c. 27), qui allait museler la Régie de l’énergie en plus de faire grimper les tarifs d’électricité d’Hydro-Québec.
Dans ce projet de loi, le gouvernement a décidé de geler les tarifs lors de la première année puis de les augmenter arbitrairement en fonction de l’inflation durant les années subséquentes. La Régie de l’énergie allait quant à elle fixer les prix de l’électricité tous les cinq ans plutôt que chaque année. Ce projet de loi a finalement été adopté sans modification majeure en décembre 2019 ; nous savions dès ce moment que le gouvernement frapperait un mur et que le consommateur serait perdant un jour ou l’autre.
Ce mur, nous le frappons maintenant : 2,6 % d’augmentation des tarifs d’Hydro-Québec pour la prochaine année. Questionné sur cette hausse, le ministre de l’Énergie, Jonatan Julien, répondait récemment dans une entrevue dans les médias que la Régie de l’énergie pourrait diminuer les tarifs lors de son prochain examen, en 2025, si elle évalue que les Québécois ont payé leur électricité trop cher.
Une réponse insatisfaisante à notre avis. Les répercussions d’une telle hausse sont réelles et immédiates et viennent fragiliser davantage les consommateurs québécois à faible revenu et de la classe moyenne, qui n’ont tout simplement pas les moyens d’attendre une potentielle baisse des tarifs dans quatre ans, et ce, sans possibilité d’obtenir un remboursement des montants qui seraient versés en trop.
Il est important de mentionner que le fait de lier directement les tarifs d’électricité à l’indice des prix à la consommation est loin d’être justifié. L’évolution des tarifs d’électricité devrait plutôt dépendre des contextes financier et économique auxquels font face les distributeurs d’énergie. Les ménages québécois sont mieux servis lorsqu’un organisme neutre fixe les tarifs dans le cadre d’un processus rigoureux et concilie les intérêts de tous. Indexer les prix de l’électricité selon l’inflation expose les consommateurs aux variations de composantes volatiles (aliments, pétrole, etc.) bien loin de la réalité du marché de l’électricité.
Rappelons-nous que l’électricité fournie par Hydro-Québec est un service essentiel. Non seulement les consommateurs sont contraints d’en consommer, mais ils n’ont pas le luxe de choisir entre différents distributeurs. C’est la raison pour laquelle un mécanisme neutre, logique et indépendant, sans politisation ni partisanerie, est nécessaire dans le cadre de la fixation des tarifs d’Hydro-Québec. En souhaitant simplifier le processus de fixation des tarifs d’électricité, le gouvernement a dépouillé la Régie de l’énergie de pouvoirs qui sont au cœur de sa mission et dont bénéficie l’ensemble de la clientèle d’Hydro-Québec.
Nous suggérons fortement au gouvernement de revenir sur sa décision en permettant à la Régie de décider du bien-fondé des tarifs d’Hydro-Québec, et ce, dès l’an prochain. Nous sommes d’avis que le gel ou la fixation des tarifs par l’inflation ne sont pas des solutions viables à long terme.