Cinq pays, cinq approches du nucléaire

L’Allemagne garde le cap pour sortir du nucléaire à la fin de cette année. Malgré les pressions énergétiques exercées par la guerre en Ukraine, les six derniers réacteurs devraient être mis à l’arrêt d’ici le 31 décembre. Le gouvernement d’Olaf Scholz entend faire le grand virage vers les énergies renouvelables (80 % en 2030, 100 % en 2035) sans l’atome, mais des analystes s’inquiètent que le remisage du nucléaire ne retarde la sortie du charbon. « L’énergie nucléaire est la mauvaise voie, insistait M. Scholz il y a un an. […] Le problème des déchets n’est pas résolu. La construction de nouvelles centrales est très chère. »
Grand brûlé nucléaire lors de la catastrophe de Fukushima, le Japon effectue un retour prudent vers l’énergie atomique. L’an dernier, une dizaine de réacteurs satisfaisant aux exigences plus strictes de sécurité établies après l’accident ont été redémarrés. Des 54 réacteurs en activité avant 2011, bon nombre ne ronronneront jamais à nouveau. Le premier ministre Fumio Kishida, en poste depuis octobre 2021, poursuit l’effort des gouvernements précédents pour convaincre la population d’accepter le nucléaire, malgré le traumatisme collectif, afin de réduire le recours du pays aux énergies fossiles.
Ce texte est publié via notre Pôle environnement.
Les États-Unis sont un géant nucléaire aux pieds d’argile. Plus grand producteur mondial, le pays compte sur un parc atomique vieillissant ; par ailleurs, une seule nouvelle centrale est en construction. Le président, Joe Biden, tient toutefois à fouetter ce secteur pour réussir la sortie des énergies fossiles. Il y a quelques jours, Washington a lancé un programme de subvention d’une ampleur historique pour sauver les centrales vieillissantes. Les 55 centrales nucléaires produisent actuellement 20 % de l’électricité étasunienne, soit la moitié de son énergie sans carbone.
La construction d’une première centrale nucléaire en Égypte, à quelque 130 kilomètres du Caire, est en démarrage. Les installations d’El-Dabaa, qui fourniront à terme 4800 mégawatts, sont le fruit d’une entente entre les gouvernements égyptien et russe. L’agence nucléaire russe, Rosatom, fournira quatre réacteurs VVER-1200 et Moscou prêtera 25 milliards de dollars américains pour la réalisation du projet. Cette initiative fera de l’Égypte, avec l’Afrique du Sud, l’un des deux seuls pays d’Afrique à compter sur l’atome. Des dizaines de pays du continent ambitionnent cependant de produire de l’énergie nucléaire dans les prochaines décennies.
Avec ses trois centrales, l’Argentine est le plus grand producteur d’énergie nucléaire en Amérique latine. L’atome fournit aux Argentins environ 4 % de leur électricité, mais le gouvernement estime que cette proportion pourrait doubler d’ici quelques années. En février, Buenos Aires a signé une entente avec la Compagnie nucléaire nationale chinoise pour le financement à 85 % d’un nouveau réacteur, Atucha III, près de la capitale. En mal de financement, le gouvernement argentin a réussi à officialiser ce projet après des années de démarchage auprès de Moscou et de Pékin.