«Yellowjackets»: jeunes filles interrompues

Séduite par l’intensité des premiers épisodes de Yellowjackets, l’équipe des écrans du Devoir avait osé lui réserver une place dans son palmarès annuel, anticipant une finale à l’avenant. Voicique la série « rouge gore et noir foncé », qui s’attache au destin torturé de jeunes joueuses de soccer forcées de survivre en pleine nature après un accident d’avion, nous arrive en français. Et notre intuition était juste : la saison entière, laquelle alterne sur deux temporalités, de l’horreur d’hier, en 1996, aux remords d’aujourd’hui, vaut le détour.
Oui, il y a du Lost et du Sa Majesté des mouches dans la portion survivaliste bien troussée. Il y a aussi un portrait au vitriol des aigreurs et des méchancetés de l’adolescence au féminin et de sa compétitivité forcenée. La jeune distribution est géniale, y compris la Québécoise Sophie Nélisse dans un rôle faussement effacé, éminemment complexe. Elle est parfaitement en phase avec la distribution plus mature, les actrices Juliette Lewis, Christina Ricci et Melanie Lynskey en tête. Dans la peau des survivantes, elles affrontent, 25 ans plus tard, des démons jamais complètement endormis.
Le jeu des correspondances entre les distributions est fascinant. On pense à Dark, réalités alternatives et boucles temporelles en moins. Le moteur narratif de ce thriller psychologique d’horreur signé Ashley Lyle et Bart Nickerson se nourrit plutôt de la noirceur induite par la compétition et la peur. Et même si leur vision s’appuie sur des archétypes, celle-ci est menée avec tant de panache et de nerf qu’on leur pardonne bien ce raccourci.