L’esprit à la fête, et au cinéma
Collaboration spéciale

Ce texte fait partie du cahier spécial La culture en cadeau
Pour certains, elles reviennent comme une fatalité, et pour d’autres, comme un baume à la fin d’une année souvent éprouvante, les deux dernières par exemple… On ne parle pas ici des chansons de Noël ou des décorations installées beaucoup trop tôt dans les magasins, mais de toutes ces œuvres cinématographiques du temps des Fêtes qui suintent les bons sentiments.
Cette période de l’année constitue un des temps forts pour les studios hollywoodiens, tandis que les réseaux de télévision nous inondent de valeurs sûres et de classiques indémodables. Sans compter les plateformes de visionnement, tout particulièrement Netflix, pour qui le cinéma de Noël représente un genre cinématographique en soi. Tour d’horizon de tout ce qui décorera vos écrans pendant cette pause festive.
Télé-Québec
Qui a eu cette idée toute simple, et qui fait le plein de téléspectateurs depuis 1981 ? Quarante ans plus tard, Ciné-Cadeau apparaît toujours aussi incontournable, le rendez-vous réconfortant des petits et grands, trois fois par jour. Et personne ne doit s’inquiéter : Astérix et Obélix reprennent encore du service, avec des films (Les douze travaux d’Astérix, Astérix et Cléopâtre, Astérix chez les Bretons, Astérix le Gaulois, etc.) aux allures de karaoké tellement tout le monde semble connaître par cœur les répliques les plus savoureuses. Ce ne sont pas les seules figures imposées de cette case horaire, avec les inévitables présences de Tintin, de Lucky Luke, des films d’animation faits au Québec (Le coq de St-Victor, Nelly et Simon. Mission Yéti) et, bien sûr, des Contes pour tous (La guerre des tuques, Bach et Bottine, La grenouille et la baleine).
Le jeune public de Télé-Québec sera également bien servi avec la deuxième saison de la série Le 422. Ce thriller fantastique, diffusé dans son entièreté pendant les Fêtes, raconte les aventures d’un groupe d’adolescents que rien n’effraie, surtout pas les portes qui les plongent dans des univers inquiétants.
Tout comme Ciné-Cadeau, Passe-Partout est indissociable de Télé-Québec. La quatrième saison de la nouvelle mouture débutera en janvier, mais question d’entretenir la passion pour cette émission phare, trois spéciales du temps des Fêtes sont à l’horaire, les 21 et 24 décembre ainsi que le 1er janvier, à 8 h 30, avec des thèmes de circonstance : Vacances d’hiver, Nuit de Noël et Jour de l’An.
Office national du film du Canada
À la faveur du premier confinement, beaucoup d’internautes ont enfin découvert onf.ca, ce site qui regorge de trésors de la vénérable institution, autour de 5000 titres, et de tous les genres : documentaire, fiction, animation. Pour un choix résolument jeunesse, et très animé, la page « Oh Oh ONF des Fêtes » propose une sélection de films illustrant les charmes de Noël, les beautés de l’hiver ou l’insouciance de l’enfance. Dans un palmarès tout ce qu’il y a de plus subjectif, je vous suggère de dévorer la magnifique série du cinéaste oscarisé Co Hoedeman et son charmant ourson Ludovic, le délirant du Juke-Bar, de Martin Barry — pour une rare fois, vous trouverez des coquerelles sympathiques… —, et, pour les amateurs de hockey, Le chandail, de Sheldon Cohen, avec la collaboration de l’écrivain Roch Carrier.
Netflix
Le temps des Fêtes, disons-le, n’est pas toujours de tout repos. Réunir la famille dispersée, présenter un nouveau conjoint dans un groupe tissé serré, entendre inlassablement les mêmes remarques sur le célibat d’un des convives, sans compter les débats sur le couvre-visage ou le vaccin autour de la dinde.
Avec ses moyens en apparence sans limites, Netflix propose, dès novembre, plusieurs productions originales, films et séries confondus, jamais audacieuses, destinées à perpétuer la« magie de Noël » sans bien sûr remettre en question ses excès. L’amour est dans l’air, et surtout dans ces nombreuses comédies romantiques dont la mission première est d’entretenir le rêve. C’est exactement ce que fait une Californienne prête à enfiler les kilomètres pour retrouver l’homme qu’elle aime, du moins dont elle aime la photo de profil, dans Love Hard (L’amour en vaut la chandelle), de Hernan Jimenez. Dans une variation sur le même thème, un homosexuel décide de traîner son colocataire et meilleur ami dans les célébrations familiales, question de faire taire les doléances, dans Single All the Way(Que souffle la romance), de Michael Mayer. Rien de nouveau sous le sapin, mais avec la présence de Jennifer Coolidge (The White Lotus), aucun Noël ne peut être ennuyeux.
Spécialité de la puissante plateforme, les séries ne font pas relâche pendant les Fêtes, surtout celles destinées à se coller à l’ambiance générale. Concentrées en trois épisodes seulement, les péripéties d’un célèbre rappeur et d’une journaliste ambitieuse s’entrecroisent dans Christmas Flow, qui, comme son titre l’indique, est une production française qui se déroule dans un Paris résolument chic, chargé d’ornementations de circonstance.
Crave, Disney+
À l’image d’un pied de sapin de Noël surchargé de cadeaux, l’offre de classiques de Noël est particulièrement alléchante sur Crave, entre les films indémodables (It’s a Wonderful Life), ceux qui risquent de durer encore longtemps (Love Actually), et tous les autres parfaits pour un lendemain de veille un peu difficile, entre Will Ferrell (Elf) et Arnold Schwarzenegger (Jingle All the Way). Et une fois que les enfants seront couchés et endormis, c’est le temps de se replonger dans cette série culte dont on s’ennuie tant,South Park, pour s’enfiler les spéciaux de Noël, dont un qui se déroule au Canada ! Ils sont tous réunis dans la section « Christmas Time in South Park ». Plaisir garanti, culpabilité à éviter.
Pour des choix plus consensuels et rassurants, Disney+ s’avère incontournable par la nature particulière, et historique, de son catalogue, celui d’une compagnie qui vend du rêve, de la magie, depuis 1923. Les classiques du puissant studio y sont, dont bien sûr ses films d’animation qui ont fait sa gloire, de Blanche-Neige à La petite sirène en passant par Le roi lion. Mais son étiquette « familiale » fut lourde à porter, et l’a parfois forcé à de sérieux rattrapages, comme lors de son association avec Pixar (Toy Story, Cars, Ratatouille, WALL-E, etc.), et lors de l’achat, plus tard, des droits de la saga Star Wars. Des choix éclectiques qui sauront rallier toute la famille.
Radio-Canada, Tou.tv Extra
Les émissions du temps des Fêtes se multiplient à la télévision d’État, et certaines battent chaque année des records d’auditoire, le Bye bye étant le point culminant de cette programmation spéciale. Ciné-Fête affiche plus de modestie, mais les cinéphiles pourront faire un sérieux rattrapage des grands succès du cinéma québécois des dernières années : seront présentés entre autres la trilogie de Ricardo Trogi (1981, 1987, 1991), Bon Cop Bad Cop I et II, respectivement d’Erik Canuel et d’Alain DesRochers, ou encore La Bolduc, de François Bouvier, Louis Cyr, de Daniel Roby, et Merci pour tout, de Louise Archambault.

Comme à son habitude, la plateforme Tou.tv permet aux fidèles de certaines séries de prendre une bonne longueur d’avance dans la découverte des nouvelles aventures de leurs personnages préférés. Ce sera d’ailleurs possible avec 5e Rang et Une autre histoire. Parmi les nouveautés qui ont piqué notre attention, Le monde de Gabrielle Roy, une réalisation de Renée Blanchar, dont le documentaire Le silence est sorti sur les écrans cet automne. En huit épisodes, la série décrit la jeunesse de la célèbre écrivaine au Manitoba, un territoire qu’elle a exploré dans son œuvre avant de partir à la découverte du monde pour ensuite écrire son chef-d’œuvre, Bonheur d’occasion. Les parents de la romancière en devenir sont interprétés par Martine Francke et Gaston Lepage. Une occasion unique de se replonger dans ses textes, puisque le scénario s’inspire de plusieurs moments évoqués dans ses livres, à mi-chemin entre la réalité et la fiction.
Direction le grand écran
On ne cesse de le répéter : même si la pandémie a accéléré la tendance du cinéma maison, rien ne vaut le grand écran pour une véritable expérience cinématographique. Bien que certains préfèrent rester reclus, par peur de la COVID-19 ou par simple misanthropie, l’offre cinéma pour les Fêtes 2021 s’annonce pas mal plus réjouissante que la présente, désertique.
La saison commencera en force avec la relecture de West Side Story (10 décembre) par nul autre que Steven Spielberg, projet casse-cou tant la version précédente, celle de Robert Wise en 1961, de même que le livret de Stephen Sondheim et la musique de Leonard Bernstein, ont admirablement traversé les décennies. Tout le monde attend le réalisateur de Jaws et de E.T. au détour, mais ce sera assurément à voir, et à écouter.
Après une parenthèse anglophone qui ne fut pas couronnée de succès, le scénariste (La grande séduction, de Jean-François Pouliot) et cinéaste (Les doigts croches, Starbuck) Ken Scott revient enfin au Québec, plus précisément aux îles de la Madeleine, cadre insulaire et idyllique pour quatre frères pas du tout sur la même longueur d’onde qui tentent de respecter les vœux de leur défunt père. Dans Au revoir le bonheur (17 décembre), rien n’ira comme prévu tout au long de cette virée qui met en vedette AntoineBertrand, François Arnaud, Louis Morissette, Patrice Robitaille et Julie Le Breton.
Chacun de ses films (Tangerine, The Florida Project) décrit avec une acuité digne d’un entomologiste des mondes qui n’intéressent personne, mais sous sa loupe, ils deviennent tout simplement fascinants. Sean Baker nous plonge une fois de plus dans l’Amérique besogneuse et paumée, celle des petits boulots et des maisons sur le point de s’effondrer. Dans Red Rocket (17 décembre), Sean Baker poursuit sa cruelle radiographie, avec au centre un acteur de films pornographiques dont les heures de gloire à Los Angeles sont loin derrière. Son retour dans son bled perdu ne passe pas inaperçu, surtout auprès de ses proches.
Tous les films de Guillermo Del Toro(Crimson Peak, The Shape of Water) ressemblent à un cadeau, et même s’ils peuvent sembler un peu glauques pour la période des Fêtes, l’émerveillement qu’ils procurent est infini. On risque fort d’éprouver de semblables frissons devant Nightmare Alley (17 décembre), qui se déroule dans une de ces foires de pacotille d’une époque lointaine. Mais la distribution, elle, constitue un véritable éblouissement, dominée par Bradley Cooper, qui y est entouré des meilleurs : Cate Blanchett, Toni Collette, Richard Jenkins, Willem Dafoe et Rooney Mara. Rien de moins.
Élégance et ingéniosité
Jamais ils ne pourront remplacer James Bond dans l’imaginaire collectif, mais les personnages de King’s Man (22 décembre) affichent une élégance irréprochable, savent se défendre et font preuve d’une grande ingéniosité, le tout assorti de quelques gadgets. Dans un tour de passe-passe comme certains les aiment, Matthew Vaughn, à la barre des trois films de la série, nous ramène aux origines de cette confrérie bien particulière, toujours avec Ralph Fiennes pour faire respecter les bonnes manières.

Découvrir les coulisses de la maternité d’un hôpital français, c’est ce que propose Julien Rambaldi dans C’est la vie (24 décembre), une comédie à la fois grinçante et sympathique. Même si elles viennent de milieux différents — parfois très différents ! —, les futures mères qui s’y croisent révèlent beaucoup d’elles-mêmes avant, pendant et après l’accouchement. Cette belle galerie de personnages sera rassurée par la présence de Josiane Balasko, au sommet de son art lorsqu’elle personnifie les grincheuses sympathiques, et celle de Nicolas Maury en jeune médecin anxieux, loin de sa flamboyance habituelle dans la série à succès Appelez mon agent.
Elle est assurément la mère de toutes les grandes actrices comiques, et elle est toujours aussi inimitable. Cela n’aura pas effrayé Nicole Kidman, qui se glisse dans la peau de Lucille Ball, aux côtés de Javier Bardem en Desi Arnez, son mari à la télévision (ils partageaient la vedette dans la célèbre sitcom I Love Lucy) comme dans la vie. Avec Being the Ricardos (10 décembre), Aaron Sorkin, surtout connu à titre de scénariste (The West Wing, Moneyball), décrit le génie comique de la star, mais surtout une forte période de turbulences, le couple ayant été soupçonné de sympathies communistes au temps du maccarthysme.
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